Jouer : c’est sérieux

Jouer au jeu de dame, aux échecs comme aux multiples jeux de cartes et bien d’autres en utilisant des interfaces, facilitent les contacts entre individus dans le simple fait de créer un espace virtuel de rencontre à l’intérieur d’un mode de communication axé sur des interactions prédéterminés. Rapidement ces espaces virtuels supportent un contexte d’apprentissage lié à la connaissance de soi.

Que ce soit dans le but d’acquérir un nombre spécifique de points ou d’argent, d’apprendre à mémoriser des combinatoires mathématiques ou d’affiner sa vision stratégique dans un jeu de guerre et de territoire, l’essentiel se résume toujours à développer ses forces dans l’esprit et de s’auto évaluer à travers des objectifs simples et souvent quantifiables. Ces espaces virtuels de rencontre, à caractère ludique, sont toujours régies par des règles et des méthodes de jeu afin de mieux définir une problématique à résoudre, le tout agrémentés d’une récompense symbolique pour ceux et celles qui réussissent à trouver la solution aux défis proposés.

Tous les jeux du monde engendrent des réflexions sur notre capacité à comprendre une situation donnée opposant automatiquement nos forces à nos faiblesses pour les comparer avec celles de nos adversaires. Tous les jeux sont des occasions pour vérifier l’attitude positive et négative que nous devons avoir à l’intérieur d’événements qui nous opposent les uns aux autres. Ces multiples variations de jeux d’équipes permettent d’évaluer la compétitivité des participants en révélant, au passage, un certain dépassement personnel comme trame de fond.  Les jeux de rôles et de stratégie, en définitive, sont des sortes d’initiation à caractère relationnel où l’exercice de base est de réussir à «jouer» avec un nombre restreint de composantes (personnes, objets, états d’être, stress etc,) pour bien différencier les perdants des gagnants.

Ce qui devient sérieux, dans ces exercices, c’est de pouvoir transférer cette apprentissage en une réalisation personnelle à court terme. Le jeu de société, étant l’antichambre d’une plus grande réalisation dont les applications devront avoir plus une portée à long terme en plus d’une incidence sur notre parcours de vie, se doit d’être un milieu incubateur pour développer l’estime de soi.

Regardez les animaux. Dès leur naissance, ils jouent avec leur environnement immédiat et surtout avec leurs parents, leurs frères et sœurs pour apprendre à devenir ceux qu’ils sont supposés incarner. Dans leurs jeux innocents, les animaux peuvent se tromper et ainsi ajuster leur potentiel comme si ils avaient, eux aussi, une occasion inespérée de faire connaissance avec leur corps avant d’être emporter dans le cycle de la survie de l’espèce. Les êtres humains ne font pas exception à ces règles d’apprentissage accélérées en période de jeune enfance. Dans toutes ces simulations, la quête du savoir être et du savoir faire est omniprésente .Les petits problèmes et les petits défis insérés dans des événements plus ou moins encadrés voire sécurisés par un environnement familial sont des tests qu’il est bon de faire et de refaire plusieurs fois.

L’action de jouer est sans contre dit un rituel de passage installant, insidieusement, une conscience de ses comportements psychologiques et de sa façon de percevoir le monde qui nous entoure. L’esprit du jeu, même enfantin, renforce un premier sens abstrait de l’identité et de la reconnaissance de ses pairs Cette première mise en situation ouvre la porte d’un monde qu’il faut obligatoirement habiter et ce, le plus rapidement possible. Un deuxième et un troisième sens des relations interpersonnelles appartenant à des niveaux supérieurs de raisonnement et de réflexion voit le jour après ces petites expériences. Notre monde intérieur juvénile trop souvent embrouillé par un imaginaire éclaté, s’éclairci à doucement pour faire la différence entre l’être et l’avoir, la peur et l’amour, le gain et la perte comme bien d’autres sentiments difficiles à classer sans cette différenciation du moi, du soi et des autres. Si les enfants jouent spontanément c’est qu’ils veulent s’approprier inconsciemment cette complexité psychique multidimensionnelle à travers des gestes simples, des objectifs atteignables comme des mises en situation liées à leur façon d’identifier certaines zones grises associées à l’inconnu, le mystérieux et l’incommensurable grandeur de l’égo.

Jouer à des rôles pour se mettre dans la peau des autres. Jouer à se compter des peurs pour  comprendre l’origine de ses angoisses. Jouer à développer ses forces pour accepter des défis. Jouer à se connaître pour entrer rapidement en relation avec l’étranger. Jouer à s’opposer pour tester sa logique et ses argumentaires. Jouer à résister aux critiques pour sentir jusqu’où ira ses adversaires dans la confrontation. Jouer à être un avatar pour découvrir ce que nous sommes vraiment.

Bref, il faut commencer à jouer sérieusement à se connaître en découvrant ses multiples états d’être dans la profondeur d’un espace capable de mémoriser les étapes de notre développement personnel.

Michel Delage

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